Soul - Funk

1970
classics
& rarities

Tony Swarez

De retour de sa tournée estivale avec Walkabout Sound System, Tony Swarez s’est dit qu’il devait faire un peu le ménage dans son CAFoUTCH… Il a commencé par ranger ses albums par ordre chronologique puis s’est donné comme devoir de rentrée d’en sélectionner les meilleurs extraits.
En 1970, quelques artistes noirs sont passés inaperçus comme Marshall Hooks et son black rock déjanté ou Junior Parker qui nourrit son blues d’une grosse dose de funky soul. The Temptations virent psychés, Curtis Mayfield et Shuggie Otis sortent leur premier album solo…

01. Funky Thithee by Shuggie Otis
02. The Outside Man by Junior Parker
03. I Want The Same Thing Tomorrow by Marshall Hooks
04. Psychedelic Shack by The Temptations
05. Funkier Than A Mosquito’s Tweeter by Ike & Tina Turner
06. Black & White by Young Holt Unlimited
07. Take My Love by Willie & The Mighty Magnificients
08. Living On Your Love by Johnny Adams
09. Your Thing Ain’t No Good... by Marie Queenie Lyons
10. Gatur Bait by The Gaturs
11. We People Who Are... by Curtis Mayfield
12. Dreams by Buddy Miles
13. Reverend Lee by Roberta Flack

Mundial

Brazilian
Cocktail

Bob Stereo

Grand passionné de musique populaire, Bob Stereo vient de passer une année en immersion dans l’âge d’or de la musique brésilienne.

Dans ce premier mix qui se consacre aux années 70, vous pourrez découvrir - ou redécouvrir - classiques underground et raretés, signés par le génial arrangeur Arthur Verocai, l’increvable Marcos Valle, les incontournables Azimuth - qui ouvrent le mix sous le nom d’Apolo IV dans l’un de leurs tout premiers morceaux, le vétéran Johnny Alf - dans un titre produit par Deodato, le prodige Joao Donato, ou encore le soulful Tim Maia qui conclut puissamment cette sélection. Envoyez la musique !

Tracklist

01. Apolo IV / Azimuth (Mil Milhas-Tema de Marcelo) (1969)
02. Erasmo Carlos / Mundo Cao (1972)
03. Jorge Ben Jor / Negro é lindo (1971)
04. Edu Lobo / Cantiga de Longe (1970)
05. Ivan Lins / Se Dependesse De Mim (1972)
06. Arthur Verocai / Pelas Sombras (1972)
07. Tamba Trio / Jogo da Vida (1975)
08. Joao Donato / Nãna das Aguas (1973)
09. Orlandivo / Onde Anda o Meu Amor (1976)
10. Waltel Branco / Walking (1975)
11. Jane Duboc / Mister Yes (1971)
12. Burnier & Cartier / Aí É Que Tá (1974)
13. Marcos Valle / Democústico (1972)
14. Beto Guedes / Chapeu de Sol (1977)
15. Johnny Alf / Que Volte a Tristeza (1978)
16. Lo Borges / Toda Essa Água (1972)
17. Roberto Menescal / Depois da Queda (Tema de Flor) (1969)
18. Jacks Wu / The Leader (1971)
19. Tim Maia / Eu Amo Você (1970)

Mundial

Wahran - Marseille

Oran / Marseille, deux ports face à face sur la Méditerranée, avec une (…)

Ou plus exactement le pop-raï. Née dans la ville et la région d’Oran au cours des années 70, cette musique a déferlé sur la Méditerranée et l’Europe dans les années 80, à partir du boulevard d’Athènes qui descend de la gare Saint Charles. Mais les liens musicaux entre les deux cités sont plus anciens que la vogue des Chebs, à découvrir dans ce mix multi-supports, multi-périodes, thématique et exigeant, mais néanmoins un peu bordélique, on est quand même à Marseille.


Maurice El Medioni

  Touchia Zidane 

 

Maître du pianoriental, Maurice El Medioni maîtrise aussi bien l’arabo-andalou que les rythmes latinos ; à l’orée des années 50, il mélange les deux et va jouer un rôle inestimable dans la formation de la chanson urbaine oranaise moderne. Maurice El Medioni s’installe à Marseille en 1962, avec l’émigration des Pieds Noirs vers la métropole, et sera un infatigable animateur de la vie musicale de la ville jusqu’à son récent départ pour Israël.
(titre sans rapport avec le célèbre footballeur dégarni, c’est une référence au mode « zidane » de la musique arabo-andalouse)
Extrait du CD Buda « Le meilleur des trésors de la chanson judéo-arabe ».


Khaled

  Hada Raykoum 

 

« Marseille était la deuxième capitale du raï après Oran », affirme Khaled dans son autobiographie Derrière Le Sourire. Ici, un de ses tubes d’avant la gloire internationale qui a suivi Didi, publié par les éditions MCPE qui avaient un pied à Marseille et l’autre à Barbès.
K7 MCPE 1198


Sami El Reliziani

  Alemtek L’houb 

 

Comme son nom l’indique, Sami el Reliziani n’est pas d’Oran, mais de Relizane, une autre ville de l’Ouest. Cet illustre inconnu a publié sur un label non moins inconnu, Solfiaphone, de très belles chansons, entre chaâbi, chanson oranaise et coplas espagnoles. On retrouve au piano l’inévitable Maurice El Medioni qui fait le lien ténu de ce morceau avec Marseille.
45 tours Solfiaphone n°5


Blond Blond

  Wahran El Bahya 

 

L’Oranais Albert Rouimi - dit Blond Blond car il était albinos - était célèbre pour ses talents d’amuseur : ambianceur de génie, imitateur de Maurice Chevalier, adaptateur en arabe de standards (Darladirladada, Et vlan passe-moi l’éponge…), mais il maîtrisait aussi l’arabo-andalou. Il a terminé sa vie à Marseille, où il a laissé autant de souvenirs musicaux que de billets au casino de Carry Le Rouet, il est enterré au carré juif du cimetière des Trois Lucs. Ici, sa version de l’hymne à Oran composé par Lili Labassi.
45 tours Dounia 1279


Cheikha Djenia

  Ya Hbibi Rani Marboun 

 

Cheikha Djenia est une figure majeure du raï féminin, dans la lignée d’une Remitti. A noter que ce style rural (voix, tambour guellal et flûte gasba), s’il est bien une source majeure du raï, a été baptisé raï traditionnel a posteriori, le terme raï étant apparu dans les années 70. Auparavant, on parlait de genre oranais pour désigner cette musique rurale venue des bédouins. Une production des années 80, éditée pour la France par les Éditions Boualem basées à Marseille, du côté de la Porte d’Aix, et toujours en activité en 2016.
K7 Boualem EBM 193


Ahmed Waby

  Yamina 

 

Entre Ahmed Waby et Marseille, la relation est de courte durée, mais assez importante, puisque notre arabo-latin lover y voit le jour en 1921. Il y passe seulement quelques mois avant de retourner grandir à Oran, la ville de son père. Il deviendra dans les années 50 un des principaux représentants du style asri (contemporain), mélange entre chanson oranaise traditionnelle, musique égypto-libanaise et rythmes latinos.
45 tours Nouvelle Vague 1065


Belkhayati

  Allah Issael 

 

Cheikh Mohammed Belkhayati a été l’un des modernisateurs du raï traditionnel, notamment en enrichissant l’instrumentation avec des cordes. C’est à Marseille qu’il enregistre son premier 45 tours, chez les éditions Tam Tam.
45 tours Oasis 10975


Rachid & Amina

  Achki Agoune 

 

Ce duo de chanteurs de pop raï côtoie les sommets atteints par Fadela et Sahraoui ou Khaled et Zahouania, mais leur notoriété est aussi mince que les autres sont célèbres. Encore une publication des éditions Boualem.
K7 Boualem EBM 256


IAM / Khaled

  Oran Marseille 

 

Réunion de vedettes.
Extrait de la compilation Raï’n’B Vol 2

Une sélection Phocéephone


http://phoceephone.blogspot.fr/

 

Mundial

Space Echo

Les résonances atlantiques et cosmiques venues du Cap-Vert

Au printemps 1968, un cargo rempli d’instruments de musiques de l’ère électrique et électronique qui s’ouvre alors, avec les synthétiseurs Hammond, Moog ou Korg, fait chemin jusqu’à Rio de Janeiro pour l’Exposiçao Mundial Do Son Electrônico, première du genre dans l’Hémisphère Sud.
Tandis que les musiciens brésiliens ou colombiens sont toujours sous le choc des nouvelles sonorités parvenant de ces instruments-machines, le bateau reprend son chemin. Il suit l’Atlantique jusqu’au large des côtes cap-verdiennes où il finira sa route, dans des circonstances troubles, coulé par l’armée soviétique dit une légende digne des meilleurs films d’espionnage d’inspiration cold war.

Et d’après vous, dans quelles mains atterrissent ces précieux objets de sons ? Dans celle de musiciens cap-verdiens, après que leur charismatique leader anti-colonial Amilcar Cabral eut la bonne idée de distribuer également ces instruments dans les établissements publics disposant d’électricité.
Voilà pour l’histoire.

Pour ses conséquences musicales, il nous a fallu attendre l’année 2016, pour nous européens et citoyens du monde, pour en prendre la mesure et nous spatialiser à notre tour à l’écoute de la musique révolutionnaire qu’inspira cette traversée atlantique imprévue d’instruments venues de l’ouest américain.

Les musiques de l’Atlantique Noir sont affaire de circulation et d’hybridation. Le Cosmic Sound of Cabo Verde que nous présente le label Analog Africa offre une nouvelle illustration de ce même changeant musical, ce syncrétisme musicologique et sonore, que fut et sont toujours les musiques noires. Le paysage sonore qu’ouvre cette compilation proposée par Samy Ben Redjeb, avec la collaboration du dj Déni Shain, démontre ainsi, si il en est encore besoin, la modernité du répertoire musical africain, ici lusophone, né aux temps des indépendances, où la culture est plus que tout question politique. Modernité non seulement musicologiques par l’apport, dans le cas présent, de l’électronique musicale, modernité, surtout, d’un territoire musical qui se nourrit des résonances culturelles de l’espace transatlantique dessiné, pour une toute autre raison, par les anciens esclavagistes et colonisateurs.

Comment maintenant retranscrire avec des mots l’expérience musicale que constitue les quinze titres de la compilation ? Exercice périlleux tant la richesse musicale et émotionnelle est au rendez-vous, du début à la fin de l’écoute. On s’installe dans ce qui fait figure de navette spatiale, commandée par les sons de synthétiseurs et soutenue par des sections rythmiques solides et hypnotiques, véritables battements de conduite honorant de la plus belle des manières l’idée même de groove. Il s’agit bien d’une évasion extra-terrestre qui, tout en nous projetant au plus lointain, nous plonge au plus profond de nous.

On décèle bien vite une signature, cap-verdienne, d’abord, avec des bases rythmiques vernaculaires, telles les Mornas, Coladeras ou Funana, lusophone, ensuite, avec des mouvements rappelant le semba angolais. Les instrumentations sont amples, complexes et magnifiques. Pianos, voix, accordéons, guitares, percussions, synthétiseurs se juxtaposent et s’harmonisent dans les hautes sphères, où l’esprit seul peut suivre la mesure. Où la technique et la théorie musicale s’effacent devant la puissance rythmique, évocatrice et spirituelle de la musique.
Les chanteurs sont nombreux, les backing band le sont moins, huit des quinze titres étant l’œuvre de Voz de Cabo Verde, dirigé par Paulino Vieira, figure tutélaire de cette folle scène cosmic sound cap-verdienne.

Un mot enfin sur les enregistrements et la production. Prodigieux. J’avais bien annoncé un mot. Il est amplement suffisant.

Vous savez ce qu’il vous reste à faire ?

  Po D Terra 

Arnaud Switch ’Groov’ Exp.

Hip Hop

CM Jones

Motions, quand le hip-hop rime avec fusion

« Le hip-hop, c’était mieux avant ? » Vieille rengaine des bboys addicts et fan éperdus du golden age du style durant les années 90. Nombre de suiveurs du mouvement s’accordent pourtant à dépasser ce présupposé quasi rituel tant la production dans le vaste champ que détoure aujourd’hui le hip hop est pléthorique et stimulante. Pas une semaine, pas un jour sans une réjouissance à se mettre dans les oreilles, entre le revival 90’s porté par la jeune ou la plus ancienne garde east coast, l’imagination débordante aux quatre coins de la planète pour digérer et réinventer sans cesse le style, tout en respectant ses racines et codes ou, (et la liste ne sera pas exhaustive) la nouvelle école du beatmaking lancée il y a maintenant une bonne dizaine d’années par un membre de la famille Coltrane, j’ai nommé Flying Lotus.

Devant tant d’offres, difficile de faire le tri et de s’arrêter vraiment sur un projet.
Et un jour, un album sort du lot, par sa qualité musicale, c’est une base incontournable, mais surtout par la sincérité qu’il dégage et la prise de risque qu’il engage.
 Ce sont les sentiments ressentis à l’écoute du dernier album du duo franco-américain CM Jones, formé par le beatmaker Creestal et le rappeur MoShadee.

Motions est un album dense, exigeant, ne se contentant pas de resservir une formule, mais puisant aux sources du jazz fusion, de la soul tendance psychédélique et du boom bap 90’s proposant, au final, une version dépoussiérée de ce que l’on nommait, au début des années 2000, le son abstract hip hop. De l’abstract, en version vocal, avec la voix de MoShadee et des featurings de classe avec Blu, King Krab et Georgia Anne Muldrow.

Motions est également le thème de l’album, le duo reprenant ici la bonne tradition jazzistique où une ritournelle faisant office de squelette musical du disque introduit, articule et conclut l’album. Par delà cette variation, l’auditeur navigue entre des productions nu soul, d’autres plus expérimentales, des inspirations tirant vers le cosmic jazz ou d’autres instrumentations plus directement boom bap.
La production assurée par Creestal est particulièrement soignée, pointue, attentive aux détails. A quelques exceptions près, comme le morceaux Old Souls, qui s’invitera avec délice dans votre playlist du samedi soir histoire d’improviser quelques pas de danse, les titres refusent la sacro-sainte construction couplet/refrain pour privilégier des montages plus complexes, faits de montées, de respirations et de transitions. Je ne ferais pas la liste des éléments instrumentaux et arrangements que j’apprécie. Tout est bon, parce que tout est cohérent, homogène et intelligemment produit. Je peux toutefois citer les batteries, bien sûr, une base quand on parle de beatmaking, et les claviers, comme sur le merveilleux titre Pay Due, ceux de Levels également où, si vous vous aventurez à fermer les yeux, le visage de Lonnie Liston Smith apparaitra comme par enchantement.
Question voix, l’ensemble est également de haute tenue. Alors, si il faut trouver une réserve, histoire d’équilibrer ne serait qu’un peu cette chronique, j’aurais aimé écouter davantage Georgia Anne Muldrow sur Rays. Enfin, c’est vraiment pour trouver quelque chose à redire.

Il me faut également évoquer le travail d’édition, avec la publication sur Munchie Records, label géré par MoShadee et Creestal. 200 copies vinyles distribuées et numérotées, avec une pochette magnifique signée par Deuce et CoreGrafx, accompagnée par quelques goodies à l’intérieur. Vous pouvez ajouter à cela un clip récemment mis en ligne, mettant à l’image le titre Old Souls. C’est même Creestal qui s’est collé à la réalisation, avec des images tournées dans Chinatown, à New York. 

Du fait maison, mais du fait maison top-notch comme on dit de l’autre côté de l’Atlantique. L’émotion qui se dégage du disque n’est pas étrangère au processus artisanal, au sens noble du terme, dont il est l’œuvre. 
J’ai débuté ce texte en évoquant un premier préjugé entourant la communauté hip hop. Pour conclure, j’en évoque un second : l’underground. Terme galvaudé dans bien de ces usages aujourd’hui, force est de constater que pour un album comme Motions et la démarche artistique de CM Jones, il reprend tout son sens et sa force. La musique n’est ici ni une histoire de moyens, de communication virale, de name dropping ou de tendance du moment. 
La musique est ici affaire de sincérité, de travail, de complicité, de respect. 

Maintenant, vous savez ce qu’il vous reste à faire !



CM Jones - Motions (Munchie records, 2016)
https://munchierecords.bandcamp.com/album/m-o-t-i-o-n-s

Switch Groov Exp.

Mundial

Max Cilla

Se plonger dans l’univers de Max Cilla et son album La Flûte des Mornes (…)

Grâce aux label et disquaire Bongo Joe & Sofa Records, le trip est de nouveau à la portée de tou(te)s, puisqu’ils ont décidé d’unir leurs forces pour rééditer cet album étiqueté (sans doute un peu rapidement) spiritual jazz, enregistré en 1981, et devenu entretemps aussi culte que rare.

Max Cilla nait en 1944 en Martinique, plus précisément au Lamentin, entre les champs de canne à sucre, la garrigue en friche et les ravines.
À l’âge de 15 ans, il se met en tête de restaurer et (re)mettre au point le processus de fabrication de la toutou’n bambou, sorte de flûte artisanale en bambou, jouée traditionnellement dans les Mornes, ces collines martiniquaises qui surplombent l’île.
Dans les années 70, il la renomme la Flûte des Mornes, crée sa tablature et en fait un instrument rapidement reconnu officiellement par les musiciens du monde entier.
En 1964 à Paris, où il suit une formation en mécanique, il croise Archie Shepp dans la rue, qui remarque sa flûte sous son bras, et qui l’invite à jouer à ses côtés le soir même dans le célèbre club de jazz Au Chat Qui Pêche. Le succès est instantané. C’est le début de la reconnaissance par ses pairs, d’une carrière internationale et de la consécration.
Il participe à l’enregistrement de l’album Angola 74 de Bonga en 1974, enseigne la flûte au grand Eugène Mona (et à Dédé Saint-Prix dans les années 80), joue avec Tito Puente, Machito, puis plus tard le saxophoniste américain David Murray ou tout récemment le joueur guinéen de kora Djely Moussa Condé.
L’univers artistique de Max Cilla est large, puisqu’il a participé à la création de pièces de théâtre et de contes (au Japon et en Angleterre notamment), a écrit pour le cinéma et collabore (encore aujourd’hui) avec des poètes et des slameurs, entre autres.

Avant cette indispensable réédition, on avait pu (re)découvrir le flûtiste en 2015 sur la savoureuse compilation Kouté Jazz du label parisien Heavenly Sweetness, parmi d’autres trésors oubliés du jazz antillais.
L’écoute du présent album fait plonger l’auditeur dans un univers envoûtant, à la fois dansant (avec ces percussions traditionnelles terriblement entraînantes et cette ligne de basse au groove irrésistible), et quasi-mystique, lui procurant des sentiments de joie, de bien-être et d’énergie pure. Réussissant le tour de force d’allier la danse et la contemplation, l’introspection et la communion, le disque est à la fois taillé pour le dancefloor, avec des titres comme La Flûte Des Mornes ou

  Crepuscule Tropical 

, et une écoute plus intime.
Notons qu’on retrouve sur ce disque le pianiste Georges-Edouard Nouel, dont l’album non moins indispensable Chodo de 1975, vient lui aussi d’être réédité il y a quelques semaines.
Pour conclure, citons Max Cilla lui-même, qui explique le but poursuivi par sa musique et qui résume si bien les sentiments qu’elle inspire : « A une époque où nous sommes souvent manipulés à des fins commerciales, j’aimerais que ma musique permette à tous ceux qui l’écoutent de retrouver l’authenticité de l’être, de redécouvrir la richesse qui est en eux ».

Bon-Ton Roulay

Electronic

La syntaxe Tobin

Au début des années 2000, Amon Tobin incarnait une valeur sûre du label (…)

Interview par Val pour la revue Scratch n°14 (An 2000),
Photo / Frédéric Favre, Collage / Abe

Amon semble à l’aise. Souple et fluide, il s’envoie sur la banquette du café parisien dans lequel nous avions rendez-vous. La conversation s’engage d’elle-même. Le contact est établi. Il m’explique qu’il vit à Brighton, sur la côte sud de l’Angleterre, loin des agitations citadines, concentré, tout en assemblage... jusqu’au moment fatidique où le micro arrive sur la table. Là, il se raidit, s’enfonce davantage dans le cuir qui grince. J’appuie sur REC, il croise les bras. Et je constate que plus jamais il ne finira ses phrases.

Pour commencer, qui est Amon Tobin ? Sur les pochettes, ton visage n’apparaît jamais au profit de visuels assez abstraits...

Ce n’est pas vraiment difficile à expliquer. Et pour peu que j’y pense, je suppose que c’est quelque chose qui me convient parce que la musique parle d’elle-même, il ne s’agit pas de moi, ni de ma personne, ni de mon histoire ou de mon image. C’est la musique qui compte, et elle seule.

Ainsi tu cherches vraiment à disparaître derrière ta musique ?

Non, je n’y pense même pas. Mais, regarde, il suffit de voir ce qui se passe sur les dance floors branchés. Les types se disent que c’est bon pour eux, ce qui les intéressent, c’est de devenir pop et pour cela, il sont prêts à jouer ou à faire des disques faciles pour être acceptés et reconnus et c’est ce qu’ils en retirent qui les intéressent. Quand je bosse sur mes morceaux, je suis à l’écart des spots et des flashes, ainsi je n’ai pas à plaire. Les gens apprécient ou pas, mais je ne vais pas me mettre à faire des tracks pour que les gens m’aiment. Ce type d’attitude est propre à l’industrie.

Je pensais, par exemple, à Aphex Twin, qui montre sa tête un peu partout. Il semblerait que ce dernier n’en finisse pas avec l’imagerie rock.

Je vois de quoi tu parles. Je crois qu’Aphex Twin pourrait répondre que son attitude est une critique de cette imagerie. Et je sais que c’est à cause de son propre sens de l’ironie qu’il agit comme ça.

Cette position de retrait est quelque chose que tu sembles partager avec les grands artistes ou écrivains qui sont maintenant des références. Est-ce que la citation de Levi-Strauss dans ton album « Bricolage » est aussi une manière de marquer ce retrait ?

Je l’ai cité parce que j’y ai trouvé une description de la façon dont je procède moi même. Bricolage est mon manifeste sur Ninja tune. Je veux que les gens comprennent, parce que la musique n’a pas été fabriquée à l’aide d’instruments, elle résulte plutôt d’une espèce de processus. Et la meilleure façon pour moi de le concevoir a été mise en mot par un anthropologue. Il parlait précisément de la manière dont d’autres cultures peuvent utiliser des objets qui, pour nous, ont une fonction précise. Par exemple, nous utilisons un micro pour enregistrer, pour nous c’est son usage normal, mais dans d’autres cultures on pourrait l’utiliser comme... comme...

... comme bijoux ?

C’est ça. Exactement, et c’est ainsi que je considère les samples. En effet, Les samples que j’ai utilisés ne voulaient pas être des samples, ils avaient des usages spécifiques dans tel ou tel morceau, telle ou telle chanson avec, à chaque fois, son contexte d’origine et moi je les ai pris et les ai transformés en quelque chose d’autre. Ainsi, si j’ai cité Lévi-Strauss, c’est que je me sentais proche de son propos, ce n’est pas parce que j’étais étudiant en anthropologie ou quoi que ce soit... Il n’y a pas de grosse machine théorique derrière Bricolage, il l’a très bien formulé, c’est tout.

Les samples sont comme du matériel rapporté, comme le résultat d’une espèce de chasse. N’y a-t-il pas là un étrange rapport à la musique ? Tes pochettes, ton mode de travail (assemblage, agencement...) tout cela a une étrange texture constructiviste...

Non, ce n’est pas comme si j’étais partis d’un plan. C’est beaucoup plus simple. Ce n’est pas comme si j’avais pris une décision. Je suis comme conduit par un instinct caché. Par exemple, je me demande souvent « Tiens. Qu’est ce qu’il se passerait si je mettais ceci et cela ensemble ? Et si je faisais ça ? ». J’aime vraiment cette partie de mon travail, c’est comme si je me promenais dans une ville dont les passants seraient des sons. C’est un processus qui n’est pas determiné par une structure préconcue. La raison pour laquelle j’ai utilisé des samples, c’est que je ne pouvais pas apporter de contribution authentique à la musique, car je ne suis pas assez bon en tant que musicien. Et je ne suis pas noir americain, tu captes ? Parce que toute la musique que j’aime est noire et américaine : le rap, le blues. Et j’aime vraiment le blues. Au tout début, j’en jouais, mais comme ça, sans y penser. Je n’ai jamais rien fait de sérieux, pas de morceaux et je crois que c’est parce que je ne fais pas partie de cette culture. Je ne suis pas né dans le sud des Etats-Unis, ni à la Nouvelle-Orléans. Je n’ai pas souffert comme ont souffert les bluesmen. Mais lorsque tu samples un passage, c’est comme soudain dire : « D’accord. Je ne fais pas partie de cette culture mais je suis sensible à cette musique et elle me dit quelque chose sur ma propre situation. » Ainsi, je ne trahis pas les musiciens et la musique que j’utilise, je la fais mienne.

C’est une espèce de retour : Tu empruntes quelque chose et par là même, tu marques ton attraction...

Exactement, et c’est authentique. Etre attiré par un passage, par un son, ce n’est pas forcement le soumettre, à la manière d’un colonisateur ou d’un profiteur. Cela équivaudrait plutôt à dire : « Ecoute. Je ne vais pas essayer de sonner comme ce type, je vais plutot le sampler et je vais le tordre, le transformer et l’agencer dans mon propre contexte ». Alors sampler, c’est collecter des bouts, des sonorités, des accords qui me parlent mais avec ces morceaux, ce sont aussi des parties de moi-même que je capture. Je crois qu’au fond, c’est de mouvement qu’il s’agit. Il ne s’agit pas de reproduire ou de ressembler à... il s’agit de transformer ce qu’on emprunte, de lui donner une orientation nouvelle. J’ai l’impression que beaucoup de ce qui se fait aujourdhui fonctionne par reproduction. Ce sont des musiciens pour la plus part, mais ils sont si souvent influencés par leurs modèles qu’ils ne font rien de neuf. Et la reproduction n’est jamais aussi bonne que l’original, aussi travaillée soit-elle. Pour ma part, je suis plus interessé par la transformation de choses existantes. Faire du neuf avec du vieux.

Il s’agit là de l’ambiguïté majeure du sampling, celle aussi de la technologie. Qu’en dis-tu ? Est-ce que tu es de cet avis ?

Je crois que oui et je crois aussi que les machines simplifient la tâche. Mais au fond ca ne fait pas grande différence. La musique, c’est une question de présence, où que tu sois né, quelle que soit la technique ou l’instrument que tu utilises, que tu joues de la guitare ou que tu samples, peu importe. Tu peux disposer du studio le plus balaise et en sortir avec un tas de merde, et c’est souvent le cas. Les gens qui bossent dans de gros studios font souvent de la daube.

Il existe une image quasi-mythique de la technologie. On lui prète une espèce de pouvoir magique... Et il semblerait qu’elle s’épuise dans l’imitation. En effet, lorsqu’elle propose des modélisations, le plus souvent elle n’apporte rien de plus...

Exactement. Et je crois que c’est pour cela que lorsque les samplers sont devenus accessibles, on voyait ça plutôt comme un outil. Les gens se disaient « Terrible ! Maintenant, je vais pouvoir mettre une vraie guitare dans mon morceau » et la guitare devenait une chose évidente. Je crois que c’est une erreur, parce que cela a engendré une attitude du type : « Je dois absolument inclure une putain de guitare dans mes morceaux. » Alors que l’intérêt des samples, c’est de permettre un usage original d’un son de guitare. Ce qui est intéressant, c’est d’obtenir des motifs ou des effets que le sampler est le seul à pouvoir produire - trafiquer le son - et non l’utiliser en vue d’imiter un instrument. Le sampler offre des options supplémentaires et si tu ne peux apporter une réelle contribution à la musique en tant que musicien, ce n’est peut-être pas une bonne idée de faire semblant de jouer de ceci ou de cela. C’est un peu ce qui s’est passé lorsque les synthétiseurs sont apparus, à la fin des années 70 : les sons de synthèse cherchaient à imiter des sons de vrais instruments, ce qui a pu donner - par exemple - des sons de cordes moisis. L’approche positive de la synthèse, c’est quand on n’essaie pas de recréer des sons d’instruments existants mais quand on en crée de nouveaux, inédits, des sons qui ne peuvent être produits que par de la synthèse. C’est ce qu’a fait Kraftwerk. Pour moi, bidouiller, tripatouiller des potards, générer des fréquences étranges, c’est ca qui est intéressant.

Tu te souviens sans doute des débuts de la jungle. Ces breaks compliqués, sa programmation virtuose et surtout... une grande générosité. Pour pas mal de gens, tu es le dernier artiste qui perpétue cette tendance.

Vraiment ? C’est plutôt ironique. Mais je ne me vois pas comme le dernier héros de la jungle. D’ailleurs il n’y a rien de bien glorieux là-dedans. C’est juste que les gens ont peur de ne pas être joués par les DJs, et c’est ce qui tue la D&B. Ils baclent leurs productions, parce qu’ils savent qu’elles vont être mixées avec d’autres disques, encore une fois, par d’autres DJs. C’est pourquoi les morceaux sont si rigides, si formatés. Certains DJs sont devenus des superstars mais en ce qui me concerne, je fais mon truc et je me soucie peu que cela soit mixable ou pas.

Propos receuillis par Val.
Traduit par Stiff.
Mixé par Val.
Remixé par Tony Swarez pour CAFoUTCH

Mundial

Séga lé là !

Deux compilations en un peu plus d’un an, le séga 70’s a enfin la place (…)

Le séga est le patrimoine musical commun à toutes les îles de l’archipel des Mascareignes : île Maurice, Seychelles, La Réunion, pour ne citer que les plus importantes. Comme les musiques afro-américaines, il s’agit d’une rencontre d’abord entre des rythmes africains pratiqués par les esclaves déportés depuis la côte Est du continent et Madagascar, puis avec les musiques européennes au cours du XIXe siècle. Valses, quadrilles, mazurkas se créolisent, l’accordéon se marie avec les percussions ravanne, kès et kayamb.

A partir des années 50, le séga enregistré s’édulcore peu à peu jusqu’à devenir pour sa partie la plus commerciale une musique sans saveur. A La Réunion, c’est le retour aux racines du maloya qui va amener un renouveau musical à la fin des années 70, tandis qu’à l’île Maurice, le seggae (mélange de séga et de reggae) endosse la fonction contestataire.

La dernière compilation en date, Soul Sega Sa, parue chez Bongo Joe, tout comme Soul Sok Sega parue chez Strut en 2016, s’attache à mettre en valeur les titres plus profonds, plus concernés socialement du séga 70’s, à rebours de l’image de musique légère, consensuelle, voire touristique. Les deux labels ont également sélectionné les titres les plus en phase avec l’oreille 70’s des DJs et du public, en choisissant des titres avec un clavier soulful, une guitare bluesy, ou une innovation électronique.

Je vous recommande également chaudement la compilation Oté Maloya, toujours chez Strut, consacrée à cette musique réunionnaise, aux mêmes racines que le séga, mais restée beaucoup plus dépouillée en raison de son interdiction jusqu’en 1982

  Amour Artificiel 

L’Espadrille


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